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Les rêves volés : Pourquoi demande-t-on rarement à un enfant handicapé ce qu’il veut faire plus tard ?

Un enfant de cinq ans est un rêveur invétéré. Quand on lui demande ce qu’il veut faire plus tard, il vous répondra peut-être qu’il sera astronaute, médecin, artiste, pompier ou pilote d’avion. On sourit à ses ambitions, on l’encourage. Parce que rêver fait partie de la construction de son identité, parce que s’imaginer dans l’avenir aide à structurer son regard sur le monde et à trouver sa place.

Mais demande-t-on la même chose à un enfant handicapé ?

Le silence qui tue les rêves

Dans une société validiste, où les normes d’accessibilité sont encore trop souvent bafouées, la réponse est souvent un silence pesant. Par omission, par gêne ou, pire, par désillusion. On ne demande pas à un enfant handicapé ce qu’il aimerait faire plus tard parce qu'on présume que ses rêves sont limités par ses capacités physiques ou mentales. Ce que l’on dit implicitement à cet enfant, c’est que son horizon est déjà tracé, réduit à ce qu'il "pourra" faire dans un système bâti pour ceux qui se meuvent, pensent et agissent sans barrières.

Et pourtant, ces enfants rêvent. Ils regardent les étoiles avec la même intensité, ils s’imaginent médecins, pilotes, artistes, astronautes, eux aussi. Mais personne ne les interroge, personne ne leur offre ce précieux espace où le rêve existe, même si la réalité semble le contredire.

Le rêve comme moteur de l’ambition

Rêver d’un avenir, c’est bien plus qu’un jeu d’enfants. C’est ce qui nourrit l’ambition, c’est ce qui permet à un enfant de se projeter, de développer des passions, des compétences, de chercher des solutions là où la société impose des limites. Même si l'enfant handicapé ne pourra pas devenir astronaute, pourquoi ne pas lui permettre de rêver d’exploration spatiale ? Qui sait s’il ne pourrait pas un jour, à sa façon, contribuer à la recherche scientifique, devenir un expert en astronomie ou un inventeur de technologies pour rendre l’espace plus accessible ?

En étouffant le rêve dès l’enfance, on leur retire cette possibilité. On enferme l’enfant dans un carcan de réalités que lui n’a même pas encore envisagées. L’avenir est peut-être compliqué, mais le rêve, lui, est essentiel. Il permet de se construire, de se sentir vivant, capable de dépasser des obstacles.

L’importance des modèles inspirants

En plus de leur permettre de rêver, il est crucial de leur montrer des modèles inspirants, des rôles modèles handicapés qui ont su défier ces obstacles. Combien d’enfants handicapés connaissent des figures de réussite dans des domaines où ils se projettent ? Trop peu. Pourtant, les exemples existent. Des personnes handicapées sont devenues artistes, scientifiques, politiciens, entrepreneurs, écrivains. Ce sont ces exemples-là que nous devons leur montrer. Ce sont ces visages, ces parcours qu’il faut mettre en avant.

Un enfant qui voit un adulte comme lui, réussir malgré les barrières, malgré le monde qui lui dit "non", peut s’imaginer à sa place. Il peut commencer à envisager que, même dans cette société encore trop peu accessible, il peut tracer son propre chemin.

Une société qui doit changer

Bien sûr, rêver ne suffit pas. Il ne s’agit pas de donner de faux espoirs. Mais il s’agit de permettre à ces enfants de construire leur propre imaginaire et, surtout, d’ouvrir des portes là où la société s’évertue à en poser des fermées. Une société plus accessible, plus inclusive, devrait permettre aux enfants handicapés d’envisager tous les métiers, à condition que les adaptations nécessaires soient mises en place.

Il est indéniable que notre société validiste bride leurs opportunités, qu’elle rend difficile l’accès à certains métiers ou à certains environnements. Mais ce n’est pas une raison pour leur ôter le droit de rêver. C’est à nous, en tant qu’adultes, éducateurs, parents, de poser la question : "Et toi, que voudrais-tu faire plus tard ?" tout en travaillant pour rendre ces rêves possibles. Parce qu’en fin de compte, c’est aussi à travers leurs rêves que notre société pourra changer, et devenir un peu plus accessible, un peu plus juste, un peu plus humaine.

Les rêves ne devraient pas être une question de capacité, mais une question d’imagination. Demandons aux enfants handicapés ce qu’ils rêvent de devenir. Offrons-leur les moyens de se projeter, de s'inspirer et de bâtir un futur à leur image, aussi complexe soit-il. Parce que leur monde est aussi vaste que celui de n'importe quel enfant, et leurs rêves aussi légitimes.